Le New York Times a rapporté le vendredi dernier que les simulateurs utilisés pour la formation des pilotes « ne reflétaient pas l'immense force qu'il faudrait aux pilotes pour reprendre le contrôle de l'avion » après avoir désactivé les commandes de compensation à assistance électronique. La désactivation du logiciel de contrôle de compensation en cas de mauvais fonctionnement du MCAS a été l’une des recommandations de Boeing après le premier accident mortel du 737 Max. Mais il se trouve que les pilotes, y compris ceux de la compagnie Ethiopian Airlines, n’avaient pas été formés à prendre en main ce qui suit la désactivation de ces fameuses commandes.
Cependant, Il semble que cette défaillance n’est plus d’actualité. Dans une déclaration, l'avionneur américain a déclaré qu'il avait « apporté des corrections au logiciel de simulation du 737 MAX et qu'il avait fourni des informations supplémentaires aux exploitants de l’appareil pour s'assurer que l'expérience du simulateur est représentative dans différentes conditions de vol ».
Pour rappel, le MCAS est un dispositif matériel et logiciel du Boeing 737 MAX destiné à éviter le décrochage en pilotage manuel. Quand il détecte que l'incidence de l'avion dépasse une valeur considérée comme dangereuse, en fonction de la vitesse et de l'altitude, il s'active pour compenser et emmener l’avion à voler horizontalement. Mais les pilotes n’ont eu connaissance de l’existence et du fonctionnement de ce dispositif qu’après l’accident du Lion Air. Lors d’une réunion secrète, que les responsables de Boeing ont eu en novembre avec les pilotes d’American Airlines, Mike Sinnett, vice-président de Boeing, a dit :
« Je ne sais pas si le fait de comprendre ce système aurait changé le résultat. Nous essayons de ne pas surcharger les équipages avec des informations inutiles pour qu'ils sachent quelles sont les informations que nous croyons importantes ».
Les instructions de Boeing après le premier écrasement étaient de désactiver les moteurs électriques du compensateur du stabilisateur, qui devraient empêcher le MCAS de fonctionner. Cependant, ces instructions ont poussé les pilotes à se fier au compensateur manuel, une très grande roue mécanique dans le poste de pilotage qui ne fonctionne pas forcément comme lors de la simulation.
Lorsque Boeing a lancé son 737 Max, il croyait que les pilotes n'avaient pas besoin d'expérience sur les simulateurs de vol, et la Federal Aviation Administration avait accepté. Le constructeur a trouvé que les pilotes pouvaient se passer de cette simulation au sol, a rapporté le New York Times la semaine dernière. Selon lui les organismes de réglementation ne l'exigent pas. Toutefois, de nombreuses compagnies aériennes avaient acheté ces appareils à coût plusieurs millions de dollars pour donner plus de pratique à leurs pilotes. Cependant, ces simulateurs de vol 737 Max approuvés par Boeing ne reproduisaient pas correctement ces forces sur le volant de compensation mécanique, mais auraient plutôt pu donner un faux sentiment de sécurité aux pilotes.
Sur le vol Ethiopian Airways, les pilotes ont eu du mal à tourner le volant mécanique alors que l'avion se déplaçait à grande vitesse et que la pression de l’air était immense sur la queue. Les simulateurs ne correspondaient pas à ces conditions, et les pilotes ont constaté que le volant était beaucoup plus facile à tourner qu'il aurait dû l'être. Il semble qu’après avoir réussi à couper le compensateur électrique selon les instructions de Boeing, les pilotes du vol ET302 d'Ethiopian Airways, n'ont pas pu déplacer le volant de compensation contre les forces aérodynamiques énormes causées par l'accélération vers le sol de l’avion.
Les organismes de réglementation tentent maintenant de déterminer quelle formation sera nécessaire pour les pilotes avant de lancer de à nouveau les avions 737 Max.
Les mises logicielles seraient prêtes et testées par Boeing
Boeing a déclaré, la semaine dernière, qu'il avait terminé la mise à l'essai de ses mises à jour logicielles sur son 737 Max. Selon l’avionneur, le correctif apporté rendra possible ce qui suit :
- Le système de commandes de vol va maintenant comparer les entrées des deux capteurs de l'angle d’attaque. Si les capteurs sont en désaccord de 5,5 degrés ou plus avec les volets rentrés, le MCAS ne s'activera pas et un indicateur sur l'écran du poste de pilotage avertira les pilotes ;
- Si le MCAS est activé dans des conditions anormales, il ne fournira qu'une seule entrée pour chaque événement de l’angle d’attaque élevé ;
- Désormais, le MCAS ne peut plus commander plus de stabilisateur que l'équipage de conduite ne peut contrer en tirant sur la colonne. Les pilotes auront toujours la possibilité d'outrepasser le MCAS et de contrôler manuellement l'avion.
Selon Boeing, ses mises à jour régleront le problème du MCAS. Boeing a déclaré qu'il avait également fourni « des renseignements supplémentaires pour répondre aux demandes de la FAA qui comprennent des détails sur la façon dont les pilotes interagissent avec les commandes et les écrans de l'avion dans différents scénarios de vol. Une fois les demandes traitées, Boeing travaillera avec la FAA pour planifier son vol d'essai de certification et soumettre la documentation finale de certification ». Une formation supplémentaire à l'intention des pilotes devrait faire partie du correctif.
Bien que les 737 Max soient cloués au sol jusqu’à présent, certaines compagnies comme Ryanair continuent « à avoir la plus grande confiance en ces avions ». Ryanair a commandé un certain nombre de 737 Max qui seront livrées « à l'hiver 2019 (sous réserve de l'approbation réglementaire par l'AESA) ». Le groupe allemand TUI également devrait décider, d'ici la fin du mois, d’abandonner ou pas l'espoir de voler avec ses 737 Max pour la saison des fêtes de cette année.
Depuis que l’avion a été frappé d’interdiction de vol, Boeing n’a pas encore reçu de nouvelles commandes. Mais avec les corrections logicielles apportées au MCAS et au simulateur de vol ainsi que les formations supplémentaires à donner aux pilotes, les choses pourraient changer lors du prochain salon international de l'aéronautique et de l'espace du Bourget, un grand événement commercial qui aura lieu le mois prochain.
Toutefois, la compagnie doit encore soumettre les changements aux organismes de réglementation, qui devront les approuver avant que l'avion puisse recommencer à voler. Espérons que le système MCAS soit devenu opérationnel, que les régulateurs fassent leur travail et que les pilotes soient correctement formés et informés des mises à jour dans l’avion.
Source : Boeing, The New York Times
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