Selon des documents vus par Reuters, le ton est monté d’un cran, en octobre dernier, entre le constructeur de voitures électriques Tesla Inc. dirigé par le riche entrepreneur Elon Musk. En effet, suite à la publication des données des essais de collision de la Tesla Model 3 par la National Highway Traffic Safety Administration, l’entreprise a déclaré que son véhicule « a été conçu pour être la voiture la plus sûre jamais construite avec la plus faible probabilité de blessure de tous les véhicules jamais testés par la NHTSA ». Mais, à l’époque, l’agence fédérale américaine chargée de la sécurité routière a contesté l’interprétation que fait Tesla de ses données d’évaluation, selon des documents vus par Reuters.
Dans une première réaction au point de vue de Tesla publiée le 9 octobre sur son site Web, l’organisme de réglementation, sans préciser qu’il s’adressait à Tesla, a fait valoir que sa « cote 5 étoiles est la cote de sécurité la plus élevée qu'un véhicule puisse obtenir. La NHTSA ne distingue pas les performances en matière de sécurité au-delà de cette cote, de sorte qu'il n'y a pas de véhicule « le plus sûr » parmi ceux qui obtiennent la cote 5 étoiles ». Mais des échanges houleux ont ensuite eu lieu par courriers privés entre la NHTSA et la société, d’après les documents vus par Reuters.
Selon Reuters, les documents en questions ont été publiés par le Département des Transports des États-Unis après que le groupe de transparence juridique PlainSite les ait obtenus en vertu de la Freedom of Information Act (FOIA). Et selon ces documents, l’agence n’a pas été tendre comme dans sa première réponse intervenue deux jours après les commentaires publics de Tesla.
La NHTSA a envoyé une lettre de cessation et d'abstention à Tesla le 17 octobre, pour avoir fait des « déclarations trompeuses » sur les cotes de sécurité de la Model 3.
« Votre société a émis un certain nombre de déclarations trompeuses sur les conclusions de la NHTSA », a écrit l’agence dans sa lettre au PDG de Tesla, Elon Musk. « Votre utilisation de la cote 5 étoiles de la NHTSA et des données associées n'est pas conforme aux directives de la NHTSA ». L’agence a même rappelé que ce n'était « pas la première fois » que Tesla n'avait pas tenu compte de ses lignes directrices d'une manière susceptible de semer la confusion chez les consommateurs et de « donner à Tesla un avantage commercial déloyal ». En effet, en 2013, l’entreprise a fait une déclaration similaire au sujet de la Tesla Model S, déclarant qu’elle avait atteint « un nouveau record pour la plus faible probabilité de blessures aux occupants ».
Pour avoir persisté dans ce genre de déclaration, la NHTSA a également saisi la Federal Trade Commission (FTC), qui enquête sur les actes malhonnêtes ou trompeurs dans le commerce : « parce que votre entreprise ne s'est pas conformée à ces lignes directrices, nous soumettons cette affaire au Bureau de la protection des consommateurs de la Federal Trade Commission afin de déterminer si ces déclarations constituent des pratiques déloyales et trompeuses », a écrit l’agence dans son courrier au constructeur de véhicule électrique.
La NHTSA effectue un certain nombre d'essais de collision différents pour chaque véhicule et attribue ensuite une série de cotes allant de 1 à 5 étoiles pour différents aspects de la sécurité des véhicules. Il ne fait aucun doute que le modèle 3 s'est bien comporté lors de ces tests, obtenant cinq étoiles - la note la plus élevée de l'agence - sur tous les plans. Dans ce processus d'évaluation, la NHTSA calcule un nombre appelé score de sécurité des véhicules, que l'agence a qualifié de « risque relatif de blessure ».
Et les constructeurs devraient s’en tenir aux données publiées par l’agence. Mais Tesla a mené des investigations et découvert qu’il avait un meilleur score de sécurité des véhicules que tous les autres véhicules. Pour l’entreprise de M. Musk, ce score signifie qu'un conducteur de Model 3 est moins susceptible d'être blessé dans un accident qu'un conducteur de tout autre véhicule.
Mais l’agence fédérale n’était pas d’accord avec cet avis. Elle a dont soutenu qu'il s'agit d'une faute professionnelle statistique parce qu'il ne tient pas compte du poids du véhicule. Dans une collision entre véhicules, l'occupant du véhicule le plus lourd est moins susceptible d'être blessé. Les tests de la NHTSA, qui impliquent l'écrasement d'une voiture sur des objets fixes, ne tiennent pas nécessairement compte de cette différence, a rapporté Reuters.
Considérant ces données, l’agence a écrit : « Un certain nombre d'études de la NHTSA ont évalué l'impact de la masse des véhicules sur les taux de mortalité, et ces différences de sécurité potentielles ne se reflètent pas dans les résultats des essais de collision frontale d'un véhicule ». « Il est impossible de dire si la Model 3 est plus sûre que d'autres véhicules 5 étoiles en fonction des résultats de la collision frontale ou des scores globaux ».
Dans sa réponse au courrier privé de l’agence fédérale, Tesla n’a pas fait profil bas, en dépit de l'examen réglementaire, tandis que les documents montraient que le principal organisme de surveillance de la sécurité automobile aux États-Unis avait émis au moins cinq citations à comparaître depuis l'année dernière pour obtenir des informations sur des accidents impliquant les véhicules de l'entreprise. Un avocat de l’entreprise a écrit :
« Sauf votre respect, nous ne sommes pas d'accord avec la position de l'agence. La déclaration de Tesla n'est ni fausse ni trompeuse ». « Nous n'avons pas abordé la question du poids, ni affirmé que la Model 3 surpasserait les véhicules nettement plus lourds en cas de collision frontale ». Mais, selon Tesla, ses « déclarations sur le blog sont entièrement basées sur les résultats réels des tests et sur les propres calculs de la NHTSA pour déterminer le risque relatif de blessure et la probabilité de blessure ». Et la société a conclu que : « Compte tenu de ce qui précède, nous ne voyons aucune raison de cesser d'utiliser ces déclarations », d’après les documents vus par Reuters.
Par ailleurs, Tesla a répondu à une demande de commentaire mercredi, en affirmant que l'entreprise s'en tenait aux déclarations qu'elle avait faites en octobre dernier, sans faire d’autres commentaires. La NHTSA, quant à elle, s’est contentée de dire que l'agence s'était « engagée à une surveillance rigoureuse et appropriée de la sécurité de l'industrie ».
Le manque de clarté dans les déclarations de Tesla sur les capacités de son pilote automatique
Depuis 2016, les véhicules Tesla ont été impliqués dans plusieurs accidents de circulation dans lesquels le pilote automatique a été mis en cause. Au moins trois de ces accidents, qui se sont produits au cours des dernières années, ont fait des morts : à Delray Beach et Key Largo, en Floride, et à Mountain View. À la suite du décès d'un conducteur en 2016, le National Transportation Safety Board, qui fait enquête sur les accidents, a blâmé le pilote automatique pour l'absence de mesures de protection du système.
Après la mort de Joshua Brown, un homme de 40 ans qui était à bord de sa berline Tesla Model S, Tesla avait développé en interne, une version de pilote automatique de deuxième génération. Mais un nouvel accident mortel survenu en mars dernier montre bien que Tesla n'a pas encore résolu les problèmes que pose sa technologie de pilotage automatique. Malgré cela, le PDG et co-fondateur de Tesla, Elon Musk, ne manque pas d’occasion de vanter son pilote automatique.
Tesla voudrait proposer une expérience de navigation en pilotage 100 % autonome qui n’aurait plus besoin de conducteur et pourrait se rendre d’un point A à un point B d’une simple programmation dans son GPS, en totale sécurité, avec respect des limitations de vitesse, lecture des stops des feux de circulation et des panneaux, évitement des obstacles, respect des piétons et des deux-roues et bien plus encore. Mais même si cette situation idéale est encore loin dans le futur, Musk a récemment déclaré que toute Tesla achetée aujourd'hui constituait un « atout appréciable » en raison de son potentiel d'utilisation pour générer des revenus dans le futur.
Selon Reuters, les groupes de sécurité ont critiqué Tesla et Musk pour leur manque de clarté dans leurs déclarations sur les capacités de la fonction de conduite partiellement autonome appelée pilote automatique, qui ne constitue pas un système complet d'autopilotage qui n'aurait pas besoin d'une intervention du conducteur.
Les documents vus par Reuters ont révélé que la NHTSA avait envoyé à Tesla au moins cinq assignations à comparaître entre avril 2018 et mars 2019 concernant des accidents de la route, avec une demande d'informations sur un autre accident envoyée en juin.
Mais cette dernière révélation ne semble pas affecter le constructeur de véhicules autonome de sécurité 5 étoiles. Au contraire, les actions de Tesla ont augmenté d'environ 1 % mercredi après-midi à 232,92 dollars, a rapporté Reuters.
Source : Reuters, NHTSA
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Le , par Stan Adkens
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