La nouvelle caméra de reconnaissance faciale, surnommée la « super caméra » et dont la résolution serait quatre fois plus détaillée que celle de l'œil humain, peut se connecter à d'autres appareils, selon les scientifiques. D’après eux, l'intelligence artificielle de la caméra pourra scanner les détails faciaux de chaque individu et détecter instantanément des cibles spécifiques dans une foule de milliers de personnes. Cette évolution suscite la crainte que la surveillance de la reconnaissance faciale puisse bientôt atteindre un niveau crucial. Par ailleurs, selon Xiaoyang Zeng, l'un des scientifiques qui ont travaillé sur la nouvelle technologie, cet appareil peut capturer des images fixes et enregistrer des vidéos à la fois, a rapporté Daily Mail.
Xiaoyang Zeng, l’un des scientifiques ayant travaillé sur la nouvelle technologie, posant avec « super caméra »
La Chine n’est pas à ses débuts dans le développement de l’intelligence artificielle de surveillance de masse. Environ 200 millions de caméras de vidéosurveillance sont déjà disséminées dans les rues et dans d’autres endroits en Chine, surveillant les mouvements des citoyens et transmettant leurs données au gouvernement chinois.
La Chine dispose déjà de plusieurs systèmes de surveillance de masse
Au cours des dernières années, la Chine a mis sur pied un système national pour noter les citoyens, baptisé système de crédit social. Il consiste, en effet, à attribuer une note à chaque citoyen, fondée sur les données dont dispose le gouvernement sur les Chinois. Le système repose sur un outil de surveillance de masse et utilise les technologies d'analyse Big Data. Il permet aussi de noter les entreprises opérant sur le marché chinois.
Le système devra être pleinement opérationnel en 2020, mais il est déjà testé sur des millions de personnes. À l'instar des scores de crédit privé, le score social d'une personne peut augmenter ou diminuer en fonction de son comportement. En fonction du score, le programme peut à la fois récompenser ou sanctionner le citoyen. Les sanctions peuvent être, entre autres, l'interdiction de prendre l'avion ou le train, d’après un rapport de Business Insider publié en 2018.
Pour son bon fonctionnement, le système tire profit du plein potentiel de l’infrastructure technologique chinoise, soit quelque 200 millions de caméras croisées à des systèmes de reconnaissance faciale et à des dossiers financiers, médicaux et juridiques. Des réseaux d’intelligence artificielle avancée sont chargés de réglementer et d’interpréter les données issues de ce croisement à grande échelle.
En plus des caméras, la Chine dispose d’autres moyens de collecte de données. En mars 2018, Reuters a rapporté que la police chinoise avait commencé à tester des lunettes connectées capables de scanner le visage d’un conducteur et les plaques d’immatriculation. Les données obtenues seraient ensuite transmises à une base de données pour identifier les personnes concernées.
En peu plus tard en juin, le South China Morning Post a rapporté que le gouvernement chinois avait fait développer et mis en service des drones de surveillance presque identiques à de vrais oiseaux. Cette nouvelle technologie avait été intensivement exploitée dans la région autonome de Xinjiang, une région en majorité habitée par des populations musulmanes, d’après le rapport. Le rapport avait également indiqué qu’au moins 30 agences gouvernementales et militaires avaient déployé des dispositifs similaires dans au moins cinq provinces au cours des années précédentes.
La reconnaissance faciale étant basée sur les données du visage, les autorités chinoises auraient même commencé à se doter, depuis 2018, d’une solution pour des personnes dont le visage serait couvert ou obscurci, a rapporté Fox News en novembre dernier. Le logiciel, qui était en cours de développement par la startup Watrix au moment de la publication du rapport, pourra également identifier des citoyens en se basant sur la forme du corps et la démarche des personnes.
Pas plus tard qu’en juillet dernier, les résultats d’une enquête conjointe du Guardian, de la Süddeutsche Zeitung, de NDR, du New York Times et de Motherboard ont révélé que les étrangers et les citoyens chinois qui franchissent certaines frontières chinoises dans la région du Xinjiang, étaient contraints d'installer un logiciel malveillant sur leur téléphone qui transmettait tous leurs messages texte et autres données aux autorités.
Cependant, avec « la super caméra » conçue par l'Université Fudan et l'Institut d'optique, de mécanique fine et de physique de l'Académie chinoise des sciences de Changchun, rien ne devrait plus échapper dorénavant aux autorités chinoises, y compris la vie privée des populations.
L’annonce de la nouvelle caméra a fait craindre que la technologie de reconnaissance faciale ne viole davantage les libertés civiles
La nouvelle caméra de 500 mégapixels viendra corriger les imperfections du réseau de caméras déjà existant. Cette nouvelle technologie soulève d'autres préoccupations en matière de liberté civile en raison de l'évolution rapide de la technologie de surveillance liée à l'intelligence artificielle.
Selon Daily Mail, la Chine a commencé à utiliser la technologie de surveillance controversée dans les centres commerciaux et les aéroports depuis un certain temps et a annoncé son intention de généraliser la reconnaissance faciale dans les villes et les foyers d'ici 2020. Par ailleurs, au cours de cette semaine, les autorités de Shenzhen ont offert des déplacements gratuits aux voyageurs du métro qui acceptaient que leur visage soit utilisé par la technologie, a rapporté Daily Mail.
Selon M. Zeng, la police pourrait installer le nouveau système de caméras dans le centre de Shanghai et surveiller les mouvements de foule en temps réel, puis recouper les images avec les dossiers médicaux et criminels. Li Daguang, professeur à l'Université de défense nationale de l'Armée populaire de libération à Pékin, a aussi indiqué que le système pouvait « être très facilement appliqué à la défense nationale, à l'armée et à la sécurité publique ».
Samantha Hoffman, analyste à l'Australian Strategic Policy Institute, a déclaré que le gouvernement dispose déjà d'énormes bases de données d'images de personnes et que les données générées à partir des vidéos de surveillance peuvent être « entrées dans un pool de données qui, combinées au traitement IA, peuvent générer des outils de contrôle social, notamment des outils liés au système de crédit social ».
La Chine n’est pas le seul pays à vouloir utiliser la reconnaissance faciale pour surveiller les mouvements des citoyens et empêcher des crimes avant qu’ils ne se produisent. D’après la police de Londres, l’utilisation de la technologie est censée aider à retrouver les responsables des agressions voire des meurtres dont les rues de la cité sont le théâtre. Elle en a par ailleurs fait des tests l’année dernière à Stratford malgré l'opposition des groupes de campagne, d’après The Independent.
La police du pays de Galles du Sud a annoncé cet été qu'elle ferait, ce mois-ci, l'essai d'une technologie de reconnaissance faciale en temps réel, pratique qui a été jugée légale par la Haute Cour, d’après The Telegraph. Par ailleurs, plus tôt ce mois-ci, la police métropolitaine et la police des transports britannique ont admis avoir partagé des images avec le King's Cross Estate – un quartier de bureaux et de magasins – pour sa technologie de reconnaissance faciale, après l’avoir nié auparavant.
The Guardian a rapporté en août dernier que le Département américain de la Défense était en train d’expérimenter un nouveau système de surveillance constitué de ballons de haute altitude dans l’espoir que ce système puisse à terme constituer une plateforme de surveillance fiable, efficace et bon marché pour les missions prolongées. L’évolution de la technologie de reconnaissance faciale de surveillance constitue-t-elle une menace définitive pour la vie privée ?
Sources : The Telegraph, Daily Mail
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