Depuis quelques années, Cruise, filiale de General Motors, et Waymo, filiale d'Alphabet, sont autorisées à exploiter chacun une flotte de taxis autonomes dans certaines villes des États-Unis, dont Phoenix en Arizona et San Francisco en Californie. Mais au fil du temps, il s'est avéré un peu difficile pour les habitants de faire face à la nature imprévisible de ces flottes. Les habitants ont protesté verbalement contre Cruise et Waymo, mais comme les deux entreprises font pression pour étendre leur terrain d'opération. Cette situation ne plait pas à certains habitants de la région qui ont choisi une méthode peu orthodoxe pour se rebeller contre ces voitures autonomes.
Réunis au sein d'un groupe appelé "Safe Street Rebel", certains protestataires se servent des cônes de signalisation pour saboter les voitures autonomes de Waymo et Cruise. Le cône de signalisation semble agir comme un "trompe-l'œil" qui oblige les taxis autonomes à s'arrêter, comme s'ils faisaient face à un danger. « Tout ce dont vous avez besoin, c'est d'un cône et d'un véhicule utilitaire vide. Placez délicatement le cône sur le capot ; vous venez de créer une licorne et un ralentissement temporaire de la circulation », écrit le groupe sur Twitter. De nombreuses vidéos montrent que les voitures s'immobilisent lorsque le cône est placé sur le capot.
Welcome to Week of Cone
— ConeSF – Week of Cone (@SafeStreetRebel) July 5, 2023
On Thurs 7/13, the CPUC will vote to expand AVs in SF. Cruise & Waymo promise they’ll reduce traffic & collisions, but we know that’s not true. They block busses & emergency vehicles, create more traffic, and are a surveillance nightmare.
But there’s hope pic.twitter.com/K7e0C2nhuq
Le groupe a lancé cette semaine une opération de sabotage à grande échelle appelée "Semaine du cône". La farce est désormais virale sur Twitter et TikTok et semble gagner du terrain auprès des résidents qui en ont assez des dysfonctionnements des véhicules et des blocages de la circulation. À titre d'exemple, le service de taxis autonomes de Cruise fait actuellement l'objet d'un examen minutieux. En fait, il y a un peu plus d'un an, l'une des premières bévues de la société en Californie a été rendue publique. Des nuées de Chevrolet Bolt de la marque Cruise se sont retrouvées coincées et ont bloqué la circulation pendant plusieurs heures.
Il a fallu des conducteurs humains pour débloquer la route. Les taxis autonomes de Cruise ont aussi heurté des lignes électriques, embouti des bus publics et tenté de rouler sur des tuyaux d'incendie pendant un cas d'incendie. Les perturbations ont été telles que l'administration nationale de la sécurité routière (NHTSA) a ouvert une enquête à ce sujet. Waymo, le concurrent de Cruise, n'est pas exempt de tout reproche non plus. Des vidéos et des rapports ont émergé sur les véhicules autonomes de Waymo qui sont restés bloqués dans des rues sans issue et ont été incapables d'adhérer aux commandes lorsque la police est intervenue sur les lieux.
Malgré ces problèmes, Waymo et Cruise cherchent à étendre leurs services de taxis autonomes et s'aventurer dans un fonctionnement 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. La California Public Utilities Commission (CPUC) doit approuver l'expansion demandée par Cruise et Waymo à San Francisco le 13 juillet. D'autres opposants, comme la San Francisco Taxi Workers Alliance et l'Alliance for Independent Workers, ont protesté contre la prolifération des robots taxis, qui, selon eux, supprimeront le besoin de chauffeurs de taxi et de covoiturage. La campagne de sabotage lancée par le groupe Safe Street Rebel vise à sensibiliser les habitants de San Francisco.
Le groupe invite les habitants à soumettre des commentaires publics à la CPUC avant l'audience de la semaine prochaine. La CPUC n'autorise pas les entreprises à faire circuler leurs taxis autonomes sur les routes publiques ; c'est le domaine du Department of Motor Vehicles. En revanche, elle autorise les entreprises à faire payer les passagers pour ce service, ce qui est un élément essentiel pour développer durablement les opérations de robot taxi et de livraison autonomes. En mai, la CPUC a publié des projets de résolution approuvant l'extension des services de Waymo et Cruise, malgré l'opposition croissante des agences municipales et des habitants.
Les habitants ont demandé à la CPUC d'agir avec prudence, d'organiser des ateliers, de recueillir davantage de données, d'interdire le déploiement des taxis autonome dans le centre-ville et aux heures de pointe, et de limiter l'expansion de la taille des flottes. « Ces entreprises promettent que leurs véhicules réduiront le trafic et les collisions, mais au lieu de cela, ils bloquent les bus, les véhicules d'urgence et le trafic quotidien. Ils ont même désincarcéré une personne et un chien. Ils s'associent à la police pour enregistrer tout le monde en permanence, sans le consentement de quiconque », peut-on lire dans une vidéo postée sur les médias sociaux.
We can fight back.
— ConeSF – Week of Cone (@SafeStreetRebel) July 5, 2023
The Fun Way- All you need is a cone and an empty AV. Gently place the cone on the hood- you just created a 🦄 & temporary traffic calming!
The Responsible Way- Tune into next week’s CPUC meeting (7/13) at 11am & give public comment. https://t.co/68bCc1Iliu pic.twitter.com/bVJpqVL0Ns
Bien que l'affirmation ci-dessus soit un peu hyperbolique, il y a des pépites de vérité. En 2018, un véhicule autonome d'Uber a été impliqué dans un accident qui a tué un piéton en Arizona, mais jusqu'à présent, aucun décès n'a été causé par les taxis autonomes à San Francisco. En outre, la police a fait appel à Cruise et Waymo pour obtenir des images afin d'aider à résoudre une poignée de crimes, mais rien ne prouve que les entreprises travaillent en tandem avec la police dans le but d'enregistrer tout le monde tout le temps. D'autres critiques estiment que les autorités utilisent les habitants comme cobayes pour des technologies avant-gardistes.
« Je vois des techniciens se tordre les mains d'horreur : "quelqu'un ne va-t-il pas penser aux voitures autonomes ?". Je suis tout à fait d'accord avec. Les régulateurs californiens forcent les habitants de San Francisco à devenir des cobayes pour des technologies audiovisuelles en cours d'élaboration. La protestation active est une réponse raisonnable », a tweeté David Zipper, chercheur invité au Taubman Center for State and Local Government de la Harvard Kennedy School, en réponse au défi du cône. Le groupe Safe Street Rebel invite d'autres personnes à suivre son exemple et à immobiliser un grand nombre de taxis autonomes un peu partout.
Bien sûr, les entreprises n'apprécient pas le geste des protestataires. Waymo a qualifié cela de forme de vandalisme. « Non seulement cette compréhension du fonctionnement des voitures autonomes est incorrecte, mais il s'agit de vandalisme qui encourage un comportement dangereux et irrespectueux sur nos routes. Nous informerons les forces de l'ordre de toute interférence indésirable ou dangereuse de nos véhicules sur les voies publiques », a déclaré Waymo dans un communiqué. Cependant, selon les critiques, le mot "vandalisme" n'est pas approprié. La définition du vandalisme est d'endommager intentionnellement la propriété de quelqu'un.
Pensez aux pneus crevés ou aux fenêtres brisées. Waymo n'aura probablement pas de chance d'accuser de vandalisme quelqu'un qui met un cône sur le capot de ses véhicules. De son côté, Cruise a déclaré qu'il a un solide dossier de sécurité et que, par rapport à un conducteur humain, son conducteur autonome avait 73% moins de collisions. « La flotte de Cruise offre des trajets gratuits aux travailleurs des services qui n'ont pas d'options de transport plus fiables tard dans la nuit, a livré plus de 2 millions de repas aux San-Franciscains en situation d'insécurité alimentaire et récupère les déchets alimentaires des entreprises locales », a déclaré Cruise.
« Le fait d'entraver intentionnellement les véhicules nuit à ces efforts et risque de créer des embouteillages pour les résidents », a ajouté l'entreprise. Selon les analystes, malgré les protestations, l'astuce du cône n'aura probablement pas d'effet sur la décision de la CPUC. Les autres parties prenantes, notamment les élus, les défenseurs de l'accessibilité, les groupes de l'industrie technologique et les organisations de développement économique et commercial, sont suffisamment favorables à la décision de la CPUC pour qu'elle ne tienne pas compte des divergences. Comme souligné plus haut, l'agence devrait bientôt approuver le programme.
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