Les véhicules autonomes de Waymo sont confrontés à une révolte à San Francisco
Les véhicules autonomes de Waymo, filiale d'Alphabet, la société mère de Google, suscitent de plus en plus la révolte à San Francisco. Le sentiment de rejet a atteint son paroxysme le 10 février après qu'un véhicule autonome de Waymo s'est faufilé dans les rues de Chinatown alors que les habitants célébraient le jour du Nouvel An chinois. Dans la foulée, certains fêtards ont attaqué le véhicule, l'ont vandalisé, ont brisé les vitres et y ont finalement mis le feu. Selon les résidents, ces rues sont généralement fermées à la circulation lors de la célébration de la fête du Nouvel An chinois, une "règle" qui est bien connue.
« La plupart des automobilistes savent qu'ils doivent éviter le quartier chinois pendant les fêtes du Nouvel An lunaire. Mais l'ordinateur ne le comprend pas », a expliqué Aaron Peskin, président du conseil des superviseurs de San Francisco, qui a appelé à une réglementation plus stricte des véhicules autonomes. La destruction du robotaxi de Waymo fait suite à des accidents impliquant ces véhicules. Par exemple, au début du mois, un véhicule autonome de Waymo a heurté un cycliste. En octobre, un véhicule autonome, fabriqué par Cruise, propriété de GM, a heurté et traîné un piéton sur une distance de 6 mètres.
La Californie a par la suite suspendu le permis d'essai de Cruise pour les véhicules sans conducteur. Waymo a décrit l'acte de vandalisme comme un cas isolé, mais une source a confié à Reuters qu'elle avait roulé dans un robotaxi de Waymo le lendemain à travers une autre foule de San Francisco qui avait tiré des feux d'artifice sur la voiture. « Lorsqu'ils ont vu la voiture de Waymo, ils ont commencé à pointer directement sur le véhicule plutôt que vers le ciel », a déclaré Nathan Flurry, qui a enregistré la scène. Il se décrit comme un fan de Waymo. Cela signifie que la révolte contre ces voitures se répand davantage.
Le motif de l'attaque n'est pas clair, mais Waymo a déclaré que l'entreprise travaille avec les autorités pour répondre à la situation et la police a ouvert une enquête. Bryant Walker Smith, professeur à l'université de Caroline du Sud et spécialiste de la législation sur les véhicules autonomes, affirme que cet épisode soulevait une question légitime, à savoir si les voitures autonomes pouvaient ou devaient être capables de détecter les zones bondées de piétons et de naviguer autour d'elles. Il a déclaré à Reuters : « je serais intéressé d'entendre Waymo expliquer comment sa navigation tient compte de ce type d'incidents ».
Cependant, d'autres personnes à San Francisco, où ces véhicules sont devenus monnaie courante, soutiennent que les robotaxis sont plus sûrs que les conducteurs humains. Le maire de San Francisco, London Breed, a déclaré que l'incident de Chinatown est un acte de vandalisme dangereux et destructeur et a salué le rôle de la ville comme terrain d'essai pour le développement des véhicules autonomes. « Nous sommes une ville qui abrite des technologies émergentes passionnantes, comme les véhicules autonomes, qui changent le monde », a-t-elle déclaré.
La technologie des robotaxis n'est pas aussi "sophistiquée" que l'industrie le prétend
D'après de nombreux critiques, les robotaxis de Waymo et de Cruise mettent en danger les autres usagers de la route. Ces critiques estiment que les déclarations selon lesquelles ces véhicules sont plus sûrs que les conducteurs humains sont fausses. Ils citent des exemples pour soutenir leur position, dont en voici une : après l'incident de Chinatown, les vidéos des robotaxis de Waymo ont proliféré sur la toile. L'une d'elles montrait un camion de pompiers, en route pour une urgence, temporairement coincé derrière un robotaxi de Waymo, qui ne s'était pas complètement arrêté pour laisser passer les pompiers.
Un porte-parole des pompiers a confirmé que le véhicule de Waymo avait partiellement bloqué la route. Certains observateurs ont vu dans cet incident le signe d'un ressentiment croissant à l'égard des voitures autonomes et d'autres technologies d'IA. Missy Cummings, directrice du centre Autonomy and Robotics de l'université George Mason et ancienne conseillère auprès des organismes de réglementation de la sécurité routière aux États-Unis, a affirmé dans une déclaration : « nous voyons les gens atteindre un point d'ébullition à cause d'une technologie dont ils ne veulent pas et qui n'améliore pas leur vie ».
Par contre, Peskin estime qu'il ne s'agissait peut-être pas d'un acte anti-technologie, mais plutôt d'un simple méfait criminel commis par une bande de voyous". Le sénateur de l'État de Californie Dave Cortese, qui a proposé une loi visant à donner aux autorités locales plus de pouvoir pour réglementer les voitures autonomes, a déclaré que le fait que la voiture ait roulé dans une zone bondée pendant un feu d'artifice soulignait les lacunes de la technologie : « ce qui devient de plus en plus clair, c'est que la technologie des voitures autonomes n'est pas aussi sophistiquée que l'industrie voudrait nous le faire croire ».
Tesla, dont les véhicules électriques embarquent un système avancé d'aide à la conduite (ADAS) appelé Autopilot, fait régulièrement l'objet d'accusations selon lesquelles sa technologie n'est pas sûre et met les utilisateurs en danger. Par exemple, par le passé, plusieurs rapports ont signalé qu'à de nombreuses reprises, des véhicules Tesla pilotés par l'Autopilot ont percuté des voitures de police malgré le fait que leurs gyrophares étaient allumés. Certains critiques, notamment des législateurs, estiment que le déploiement de l'Autopilot est une expérience sur la voie publique qui menace la vie de tous les usagers.
En outre, Tesla est accusé de publicité mensongère, car les noms donnés par l'entreprise à ses systèmes d'aide à la conduite, Autopilot et Full Self-Driving, laissent entendre que ses véhicules sont autonomes, alors qu'il n'en est rien. Ces appellations poussent les conducteurs de Tesla à avoir une confiance aveugle dans ces systèmes, ce qui les rend distraits au volant. Récemment, certains conducteurs Tesla ont même commencé à mettre un casque de réalité virtuelle sur la route et laissent le logiciel défaillant Autopilot de Tesla assurer la conduite. Les autorités américaines sont alarmées par cette tendance.
Les législateurs veulent une législation stricte afin de réglementer les véhicules autonomes
À San Francisco, les autorités locales sont de plus en plus préoccupées par les incidents liés aux véhicules autonomes. Les législateurs californiens et les syndicats se sont mobilisés lundi pour appeler à des lois interdisant les véhicules autonomes. « Ces accidents ont mis un point d'exclamation sur la nécessité de légiférer », a déclaré le sénateur Cortese. Le projet de loi de Cortese vise à donner la possibilité aux villes de l'État de Californie plus de marches de manœuvre pour encadrer le déploiement des véhicules autonomes. À l'heure actuelle, seuls les régulateurs de l'État contrôlent l'octroi des permis.
Un autre projet de loi exige qu'un conducteur humain bien formé soit présent au volant des véhicules autonomes pesant plus de 4 500 kg, une classification qui inclut les camions commerciaux. « C'est une mesure de bon sens qui maintient les humains à bord d'un camion jusqu'à ce que nous ayons un plan pour nos travailleurs et que nous soyons sûrs que les frères de la technologie ne nous imposent pas une technologie dangereuse », a déclaré Cecilia Aguiar-Curry, membre de l'Assemblée de l'État, lors de la manifestation de lundi. Cela dit, ce projet de loi fait l'objet de critiques de nombreuses critiques.
Une version antérieure du même projet de loi sur les camions a été adoptée par les législateurs de l'État l'année dernière, mais le gouverneur Gavin Newsom y a mis son veto, estimant que le cadre réglementaire actuel était suffisant pour garantir la sécurité. Le projet de loi a été réintroduit à l'assemblée de l'État jeudi. Les Teamsters, l'un des plus grands syndicats américains, qui s'opposent depuis longtemps au déploiement des véhicules autonomes en invoquant les risques pour la sécurité et les pertes d'emplois, soutiennent les deux projets de loi. Le groupe estime que la réglementation est la voie à suivre.
Peter Finn, vice-président du syndicat, affirme : « les incidents de Cruise et de Waymo illustrent le fait que cette technologie n'est pas prête pour le prime time et que nous ne pouvons pas faire confiance à ces grandes entreprises technologiques pour s'autoréguler ». Toutefois, certains analystes mettent en garde contre l'adoption d'une stricte à l'égard des entreprises exploitant les véhicules autonomes. Selon eux, les entreprises technologiques contribuent largement à l'économie de la Californie, et le renforcement des réglementations sur les véhicules autonomes est perçu par certains comme compliqué.
Waymo n'a pas commenté les appels à l'adoption d'une réglementation stricte et les préoccupations croissantes en matière de sécurité. Cruise a déclaré que sa gestion de l'accident d'octobre était une erreur et a proposé de régler une enquête menée par un régulateur d'État. De nombreux États, dont le Texas et l'Arkansas, autorisent l'essai et l'exploitation de camions autonomes. La Californie interdit déjà les camions autonomes lourds, mais est en train d'élaborer des réglementations qui les autoriseraient. Le nouveau projet de loi sur les camions retarderait ce processus.
Les camions autonomes, qui circulent principalement sur des itinéraires fixes et des autoroutes, ont évité les accidents très médiatisés. Pendant ce temps, Cruise fait face à de multiples enquêtes, dont une du ministère de la Justice, et les incidents de Waymo font l'objet d'une enquête de la police de la ville.
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La technologie des robotaxis est-elle suffisamment mature pour être déployée sur les routes ?
Une législation trop stricte risque-t-elle de nuire à l'innovation dans le domaine ?
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