Le 737 Max n'intéresse-t-il plus les compagnies aériennes ? Il est encore trop tôt pour répondre à cette question, mais les derniers résultats financiers publiés par Boeing révèlent que l'avionneur n'a enregistré aucune commande pour son best-seller, le 737 Max. Les résultats publiés mardi par Boeing se comparent défavorablement par rapport à ceux de l'avionneur européen Airbus, qui a enregistré des commandes nettes pour 15 avions en mai. (Il y a eu 27 commandes, mais 12 annulations.) En outre, Boeing a vu Aerolineas Argentinas annuler une commande d'un seul 737 Max, ce qui porte ses ventes nettes à trois pour le mois.
Ces mauvais résultats font suite aux mauvais chiffres du mois d'avril au cours duquel Boeing n'avait annoncé que sept ventes, dont aucune pour le 737 Max. Les actions de Boeing ont chuté de 3 % dans les échanges mardi après-midi. Boeing espère que la lenteur des commandes reflète une accalmie des ventes avant le salon international de l'aéronautique de Farnborough, qui se tiendra le mois prochain et au cours duquel des contrats d'achat d'avions sont souvent annoncés. Mais les analystes affirment que ces mauvais résultats sont liés aux incertitudes qui entourent le 737 Max et que la tendance pourrait perdurer.
De plus, la Federal Aviation Administration (FAA) des États-Unis limite la production de l'aéronef par Boeing à la suite de l'explosion en plein vol d'un panneau du fuselage d'un 737 Max d'Alaska Airlines, d'allégations de plusieurs lanceurs d'alertes selon lesquelles Boeing aurait pris des raccourcis pour produire des avions plus rapidement, et de rapports d'inspection falsifiés sur certains 787 Dreamliner. Boeing, dont le siège se trouve à Arlington, en Virginie, a livré 24 avions de ligne en mai, dont 19 Max. La compagnie irlandaise Ryanair en a reçu quatre et Alaska Airlines trois. Airbus a déclaré qu'il a livré 53 avions le mois dernier.
Né d'une rivalité industrielle visant à produire l'avion de ligne le plus économe en carburant, le Boeing 737 Max a connu une histoire mouvementée et est devenu rapidement un désastre pour le géant américain de l'aviation. Le Boeing 737 Max n'a été mis en service qu'en 2017, mais a été impliqué dans deux accidents mortels en 2018 et 2019, qui ont coûté la vie à 346 personnes. Ces accidents ont entraîné l’immobilisation au sol du 737 MAX pendant 20 mois, une période au cours de laquelle Boeing a apporté des corrections à sa nouvelle couche logicielle appelée MCAS (Maneuvering Characteristics Augmentation System).
Ce logiciel, jusque-là dissimulé, a conduit aux deux accidents mortels du 737 Max. En effet, l'avionneur américain s’était assuré qu’il ne soit pas fait mention du MCAS dans le manuel du pilote. D'après Boeing, le MCAS ajuste la position de l'avion, en réglant les surfaces de contrôle de l'avion pour maintenir une position définie. Il a été conçu pour le faire sur la base d'une entrée d'un seul capteur d'angle d'attaque, par rapport à trois capteurs dans le modèle Airbus comparable. Et cela s'est avéré désastreux. Les enquêtes ont révélé que le processus de certifications du 737 Max a été bâclé par les autorités américaines.
L'une des enquêtes a révélé que les autorités américaines de régulation, notamment la FAA (Federal Aviation Administration) des États-Unis, ont manqué de rigueur dans le processus réglementaire de validation du 737 Max, compromettant ainsi la sécurité de l'aéronef. Le rapport de l'enquête souligne que la FAA n’a pas procédé au contrôle du MCAS comme cela aurait pu l’être. L'avionneur a effectué ses propres évaluations du système, qui n’ont pas été soumises à des tests de résistance par le régulateur. Il aurait laissé deux ingénieurs relativement peu expérimentés superviser les premiers travaux de Boeing sur le système.
« Ces accidents tragiques ont mis en évidence la conduite frauduleuse et trompeuse des employés de l'un des principaux constructeurs d'avions commerciaux du monde. Les employés de Boeing ont choisi la voie du profit plutôt que celle de la franchise en dissimulant des informations importantes à la FAA concernant l'exploitation de son avion 737 Max et en s'engageant dans un effort pour dissimuler leur tromperie », a déclaré le procureur général adjoint par intérim, David Burns, de la division criminelle du ministère américain de la Justice (DOJ). D'autres irrégularités ont été relevées plus tard par les enquêteurs.
La FAA a été fortement critiquée pour avoir certifié le 737 Max alors que les responsables de l'agence ne comprenaient pas entièrement le fonctionnement du système. Un autre rapport a révélé que le nouvel avion devrait jouer un rôle essentiel dans les plans de Boeing de concurrencer Airbus. Par conséquent, Boeing s’est plus soucié de cet objectif que de la sécurité des voyageurs. Le MCAS est un composant central dans le 737 Max, mais Boeing l'a fait passer pour une chose insignifiante lors des discussions avec la FAA. Pour cela, la FAA n'a pas obligé Boeing à informer les pilotes de son existence ni sur fonctionnement.
Alors que les enquêtes sur les deux aéronefs 737 Max progressaient, Boeing a mis à jour le logiciel MCAS et, dans une volte-face significative, a recommandé une formation supplémentaire des pilotes, parmi d'autres mesures prises pour réparer l'avion. Des rapports ont révélé que l'opposition initiale de Boeing à une formation supplémentaire des pilotes (une affaire coûteuse et chronophage qui aurait pu inciter les compagnies aériennes à reconsidérer l'achat de l'avion) était l'un des facteurs qui ont conduit l'entreprise à dissimuler la présence du MCAS sur l'avion aux pilotes et aux autorités de réglementation.
En somme, les enquêtes ont révélé que "la culture de la dissimulation" chez Boeing et le laxisme de la FAA dans le processus de certification du 737 Max ont permis à des engins de la mort de se retrouver dans les airs. Ed Pierson, un ancien cadre supérieur de Boeing, a commenté le scandale du 737 max comme suit :
Envoyé par Ed Pierson
Un panneau du fuselage d'un Boeing 737 Max 9 de la compagnie Alaska Airlines a explosé en plein vol le 5 janvier. Les enquêteurs ont déclaré qu'il manquait des boulons clés dans l'avion avant l'explosion, une défaillance qui a renforcé la surveillance du contrôle de la qualité chez Boeing et ses fournisseurs et mis une pression intense sur la direction de l'entreprise. En réaction, Boeing a licencié le responsable du programme 737 MAX pour faire face aux retombées de l'incident. Ed Clark, qui dirige le programme 737 Max depuis 2021, a été remplacé par Katie Ringgold, la vice-présidente des opérations de livraison du 737.
Ces changements ont été annoncés en février dans un courriel adressé aux employés par Stan Deal, directeur général de Boeing Commercial Airplanes. Deal a écrit que les changements de direction sont destinés à renforcer l'attention portée par Boeing Commercial Airplanes à l'assurance que chaque avion livré par la société satisfait ou dépasse toutes les exigences de qualité et de sécurité. Mais Boeing reste dans la tourmente en raison de la persistance des problèmes du 737 Max.
Boeing est accusé d'avoir fait des compromis sur la qualité et la sécurité du 737 Max dans sa tentative de concurrencer Airbus. Ils ne se sont pas concentrés sur la qualité de l'aéronef. Malgré la lenteur des ventes récentes, Boeing dispose toujours d'un énorme carnet de commandes de plus de 5 600 pièces.
Source : Boeing
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Pourquoi le 737 Max n'est-il pas définitivement cloué au sol malgré ses nombreuses défaillances logicielles ?
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