Des alertes qui, prises en compte, peuvent permettre d’éviter de mettre des vies en danger
Boeing a à nouveau fait les titres avec un avion de ligne qui a manqué de s’écraser en raison d’un dysfonctionnement logiciel. Après le 737 MAX et la litanie de révélations autour de ses défaillances logicielles qui ont provoqué plusieurs accidents mortels, c’était au tour d’un 737-800 de manquer d’ôter des vies en raison de ratés dans le code informatique de prise en charge de l’appareil.
Le Boeing, exploité par TUI, avait décollé de l'aéroport de Bristol à destination de Las Palmas (Grande Canarie) le 9 mars avec 163 passagers à bord lorsqu'il a eu du mal à décoller en raison d’un dysfonctionnement logiciel à propos duquel l’Agence britannique en charge des enquêtes sur les accidents de la filière aviation civile (AAIB) donne des explications techniques.
L'AAIB, qui fait partie du Département britannique des Transports, a déclaré que l'incident était dû à une poussée insuffisante au décollage. Les pilotes ont réglé manuellement le niveau de poussée à la suite d'un problème logiciel dont Boeing était au courant avant le décollage.
« Un Boeing 737-800 a effectué un décollage de la piste 09 de l'aéroport de Bristol avec une poussée insuffisante pour atteindre les performances réglementaires. L'automanette (le système de régulation automatique de la poussée sur les avions de ligne) s'est débrayé lors de la sélection du mode de décollage, au début de la course au décollage, et la poussée réglée manuellement par l'équipage (84,5 % N1) était inférieure à la poussée de décollage requise (92,8 % N1). Aucun des deux pilotes n'a alors remarqué que la poussée était mal réglée, et les procédures d'utilisation normalisées (SOP) n'ont pas permis de le déceler », souligne le rapport.
L’automanette est d’ailleurs le système sur lequel les soupçons de défaillance s’étaient portés dans le cas du Crash du Boeing 737 de Sriwijaya Air.Happening Now - Boeing CEO Testifies at Senate Hearing on Failures, Whistleblowers & Coverup
— As4Me&MyHouse (@4Me_N_MyHouse) June 18, 2024
Senator Hawley: We've had multiple whistleblowers come before this committee and allege that Boeing is cutting every possible corner on quality and safety... They were reassigned, they… pic.twitter.com/3VmJ9xc10n
Boeing a reconnu avec le cas du 737 MAX avoir « envoyé un avion dans un état dangereux en production »
Boeing a reconnu l'entière responsabilité du deuxième crash de son modèle 737 Max en Éthiopie, dans le cadre d'un accord juridique avec les familles des 157 victimes. La stipulation légale, déposée en 2021 à Chicago, indiquait que l'avionneur accepte la responsabilité du crash du vol 302 d'Ethiopian Airlines en mars 2019, après avoir « produit un avion dans un état dangereux », et ne chercherait pas à blâmer toute autre partie, notamment les pilotes.
Le 737 Max d'Ethiopian Airlines s'est écrasé peu après son décollage d'Addis-Abeba pour Nairobi. Il s'agissait de la deuxième catastrophe du 737 Max en six mois après le crash d'un avion de Lion Air en Indonésie en octobre 2018, tuant 189 personnes.
Un rapport, publié en septembre 2020, a mis en évidence des défaillances dans la conception de l'avion et une relation trop étroite entre la compagnie et le régulateur. Boeing a caché des défauts de conception de son jet 737 Max aux pilotes et aux autorités de réglementation alors qu'il s'efforçait de faire certifier l'avion comme étant apte à voler, selon l’enquête.
Le rapport de la commission parlementaire a examiné les défauts d'ingénierie et de conception technique de Boeing, en particulier dans le développement du nouveau logiciel de contrôle MCAS. Après 17 mois d'enquête, il a indiqué comment Boeing a tenté de minimiser la formation nécessaire des pilotes pour piloter le nouveau Max, qui était sorti en toute hâte pour tenter de concurrencer l'Airbus A320neo.
Le rapport a révélé que la compagnie avait réussi à persuader la FAA de ne pas classer le système anti-décrochage comme « critique pour la sécurité », ce qui signifie que de nombreux pilotes ne connaissaient même pas son existence avant de piloter le Max. La Commission a aussi détaillé les hypothèses erronées et dépassées que les ingénieurs ont faites sur la façon dont les pilotes réagiraient dans une telle crise et comment Boeing n'a pas installé un système d'alerte qui aurait pu avertir l'équipage, entre autres défaillances techniques.
Le rapport a regretté qu’une « culture de la dissimulation » chez Boeing ait contribué aux échecs : « Dans plusieurs cas critiques, Boeing a dissimulé des informations cruciales à la FAA, à ses clients et aux pilotes de 737 MAX ». Mais il y a eu des problèmes au sein de la FAA également. « Le fait qu'un avion conforme ait souffert de deux crashs mortels en moins de cinq mois est la preuve évidente que le système réglementaire actuel est fondamentalement défectueux et doit être réparé », selon le rapport.
Selon l’enquête, « [Les deux crashs] ont été l'horrible point culminant d'une série d'hypothèses techniques erronées des ingénieurs de Boeing, d'un manque de transparence de la part de la direction de Boeing et d'une surveillance grossièrement insuffisante de la Federal Aviation Administration (FAA) - le résultat pernicieux de la mainmise réglementaire de la part de la FAA en ce qui concerne ses responsabilités d'exercer une surveillance rigoureuse sur Boeing et de garantir la sécurité du public voyageur ».
« Les faits exposés dans ce rapport font état d'une série inquiétante de mauvais calculs techniques et d'erreurs de jugement troublantes de la part de Boeing en matière de gestion. Il met également en lumière de nombreux manquements à la surveillance et aux responsabilités de la FAA qui a joué un rôle important dans les crashs des 737 Max », lit-on dans le rapport de 238 pages qui détaille comment Boeing a tenté de minimiser les tests réglementaires.
Le modèle a été cloué au sol dans le monde entier, mais a repris du service cette année, des compagnies aériennes, dont Ryanair, prenant livraison de l'avion.
Et vous ?
Comment les entreprises aéronautiques peuvent-elles renforcer la confiance du public après des incidents aussi graves ?
Quel rôle le gouvernement devrait-il jouer pour assurer que les compagnies aériennes respectent les normes de sécurité ?
Les amendes financières sont-elles suffisantes pour responsabiliser les entreprises en cas de manquements à la sécurité ?
Comment les passagers peuvent-ils être assurés que les avions dans lesquels ils voyagent sont sûrs ?
Quelles mesures Boeing devrait-il prendre pour améliorer son programme de conformité et d’éthique ?
La transparence est-elle la clé pour restaurer la réputation d’une entreprise après un scandale ?
Quelles leçons l’industrie aéronautique devrait-elle tirer des accidents du 737 MAX ?
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